Nous sommes début novembre 1988, il est 17 heures. Gilles Pialoux, comme à son habitude, arrive en courant à @liberationfr. Il est à la fois médecin spécialiste du sida la journée et journaliste le soir. Apprenant que Barbara voulait s’engager dans la lutte contre le sida, il était descendu quelques jours plus tôt au service Culture, en «fan absolu» de la chanteuse, se disant qu’il y avait un coup à tenter : «Gérard Lefort m’avait donné son contact… mais c’était en fait celui d’une ancienne attachée de presse qui, miracle, m’avait quand même donné un numéro. Je laisse un message, sans trop d’espoir.» Pourtant quand il arrive ce soir-là à Libé, il est interpellé par sa voisine de bureau. «Il y a une Barbara qui t’a appelé. — Barbara comment ? — Barbara tout court…»
Rendez-vous est pris pour le 10 novembre à 15h. «Elle était dans sa voiture, garée devant le journal». Pialoux descend la chercher. «Et voilà Barbara, grand échalas noir qui passe devant tous les services. Le pas mal assuré mais très rapide, avec son port de tête si particulier.»
L’entretien, qui paraîtra finalement le 28 novembre, est dans son esprit une façon de dire à son public qu’elle va disparaître pendant un an pour se consacrer au sida. «Vous savez, lui dit Pialoux au moment où elle se lève, je ne suis pas que journaliste. Je suis aussi médecin. Je peux vous aider si vous voulez…» La chanteuse revient sur ses pas…
Barbara soutient des associations, participe à une ligne téléphonique pour écouter 24h/24 les malades, visite les hôpitaux, mais son projet, c’est d’aller en prison, y chanter et profiter de sa venue pour sensibiliser sur le sida. Sans que la presse le sache. «Tant que tu seras à Libé, Pialoux, je ne t’emmènerai pas…» En 1989, devenu chef de clinique, le médecin quitte Libé. Il peut alors accompagner la chanteuse. C’est le début d’un tourbillon secret où ils arpentent la France, de centrales en maisons d’arrêt, elle chantant, lui expliquant la maladie.
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📷 Philippe Wojazer / @afpphoto
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