Casque bleu en interne, casque lourd à l’extérieur de son organisation.
Depuis qu’elle a été propulsée à la tête de la CGT, il y a deux mois et demi, Sophie Binet joue tantôt au soldat de la paix, tantôt à la guerrière qui ne fait pas de quartier. Au sein de son syndicat, ébranlé – jusqu’à une date récente – par des querelles fratricides, elle pratique la câlinothérapie et l’ouverture, avec une direction qui a été élargie à quatre nouveaux membres, jeudi 15 juin. Sur les champs de bataille sociaux, elle cogne sans ménagement les « patrons voyous » et Emmanuel Macron, « le président du chaos ». La méthode a l’air de produire des résultats : pour le moment, il n’y a plus de mutinerie dans le paquebot confédéral et des vents porteurs regonflent le moral de l’équipage.
On attendait une femme mais ce n’était pas Sophie Binet. Deux autres de ses camarades convoitaient le fauteuil de secrétaire générale, à l’occasion du 53e congrès de la centrale, qui s’est tenu du 27 au 31 mars à Clermont-Ferrand. D’un côté il y avait Marie Buisson, soutenue par Philippe Martinez, le numéro un sortant. Dans l’autre coin du ring : Céline Verzeletti, la frondeuse qui avait l’appui de hauts gradés très critiques sur la direction nationale jusqu’alors en place. Finalement, ni l’une ni l’autre ne réussirent à s’imposer, face à des grands électeurs cégétistes divisés. Un vide venait de s’ouvrir dans lequel s’engouffra Sophie Binet : au petit matin du 31 mars, après une nuit de tractations hypertendues, son nom émergea comme une solution fédératrice.
Le pire avait été évité, au prix d’un big bang. Jamais, dans l’histoire de la CGT, une femme n’avait pris les rênes. Jamais, non plus (en tout cas depuis 1909), cette responsabilité n’avait été confiée à une personnalité ayant auparavant adhéré au Parti socialiste (PS), alors que ses prédécesseurs eurent, à un moment ou à un autre, leur carte au Parti communiste français (PCF).
Photo : Sophie Binet à Matignon, le 5 avril 2023. @cyrilbitton / Divergence #pourlemonde
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