Si on avait dit à Shuli Aviad, dans sa jeunesse à Tel-Aviv, que son second fils naîtrait à l’hôpital de la Charité, à Berlin, elle n’aurait jamais osé le croire. « Raphael a vu le jour dans le service pédiatrique qu’a dirigé mon grand-père, Oscar Wolfsberg, quatre-vingt-dix ans plus tôt. Il y a travaillé jusqu’en 1933, quand un de ses amis l’a averti qu’il avait été mis sur une liste noire et lui a conseillé de partir immédiatement, avec sa famille. Ils ont quitté le pays dans les deux jours », raconte-t-elle, émue. Plus tard, son aïeul a servi comme diplomate pour Israël.
Wolf, variation de Wolfsberg, est le nom que Shuli a choisi quand elle a changé de patronyme sur son application de taxi. Un réflexe de peur qui s’est généralisé parmi les Israéliens de Berlin, depuis les massacres du Hamas du 7 octobre 2023 et la multiplication d’actes antisémites qui les ont suivis.
Dans son appartement de Prenzlauer Berg, Shuli Aviad parle à toute allure de tout ce qu’elle a traversé depuis cette date. L’horreur des vidéos, les échanges permanents avec les siens en Israël, l’impression d’être mentalement là-bas. La nouvelle inquiétude ressentie ici aussi. Comme s’il fallait tout raconter, très vite, de peur de se perdre dans l’intensité de ces moments dramatiques et des réminiscences du passé de sa famille. « Maintenant, j’évite de parler hébreu à mes enfants dans la rue. J’ai réfléchi à changer notre nom à la porte d’en bas. C’est terrifiant, nous ressentons ce qu’ont dû éprouver mes grands-parents. Même à la troisième génération, nous avons tous cette peur gravée en nous, que cela puisse arriver une nouvelle fois...
Photo : @karimbenkhelifa #pourlemonde
(Extraits articles de presse) Libération, le Monde, le Figaro, L'Equipe, Télérama, Première, AFP, Reuters, AP News
jeudi 18 janvier 2024
A Berlin les Israéliens redoutent de perdre un refuge
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