Le journaliste Philippe Tesson, fondateur du Quotidien de Paris, est mort.
Dans son portrait dans Libération en 2011, il imaginait sa disparition : «Une mort subite du vieillard comme il existe une mort subite du nourrisson»
Extrait :
Il y a les gens auxquels il est inutile de présenter Philippe Tesson. Ceux-ci, ayant vécu tout ou partie de la deuxième moitié du XXe siècle, savent la place qu’y tint ce polémiste élégant et mordant, amateur de théâtre, journaliste curieux, pas franchement à gauche mais pas trop à droite non plus, rédacteur en chef de Combat puis créateur du Quotidien de Paris. Ce patron de presse a contribué à donner du relief à ces années-là, ce qui n’est pas rien, y faisant un peu plus que de la figuration, y tenant un peu moins qu’un premier rôle. Et puis il y a d’autres gens, plus jeunes probablement, qui ne connaissent de Tesson que sa dernière fonction, celle de réac de service dans diverses émissions, de vieux singe au registre de grimaces d’autant plus étendu qu’il en a produit d’inédites. Ceux-là voient sans doute ce fringant octogénaire, dont les doigts n’ont jamais approché d’autre clavier que celui d’un piano, comme un Jean d’Ormesson caustique et anticonformiste, vestige intéressant d’un temps où la presse était encore riche de dandys.
Il écrit vite, à la main, d'une écriture calligraphiée qui déroule infailliblement 32 lignes par page. D'Internet, il ne connaît que ce qu'on lui en rapporte. Sa devise ? «Un peu trop, c'est juste assez pour moi.» Son occupation préférée ? «La musique.» Il possède deux Pleyel demi-queue dans sa maison de Chatou, où il joue du Debussy le week-end.
La semaine le voit dans son appartement germanopratin, à deux pas de sa maison d'édition. L'octogénaire n'est pas du genre «c'était mieux avant», serait plutôt de la famille «ça sera mieux demain». Il est persuadé qu'après le chaos actuel - effervescence technique et sociétale qui ne laisse guère le temps de réfléchir - une nouvelle civilisation va naître. Un peu comme l'Age classique a succédé à la Renaissance.
Il aurait bien aimé voir ça.
✍️ Edouard Launet
📷 @fredstucin / @agence_myop
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