Le portrait de Brigitte Lecordier

 

Star du doublage, la comédienne de 68 ans bataille avec son fils pour réguler l’usage des intelligences artificielles qui menacent leur secteur.

Récemment, Brigitte Lecordier a créé la voix d’un étron pour une vidéo de prévention du cancer colorectal. Au nom de l’équipe du service Culture de Libération, nous lui signifions notre grand respect. La comédienne attrape le compliment en riant, affable, puis nous regarde, et l’on se dit que, décidément, certains humains finissent par ressembler physiquement à leur métier à force de l’aimer. Icône générationnelle, notamment starisée comme voix française de Son Gohan /Goku de «Dragon Ball Z», cette comédienne de 68 ans a tout d’un personnage de dessin animé. Déjà plus jeune, confirme-t-elle, elle ressemblait «à un p’tit schtroumpf». Mais revenons à nos étrons.

«Imaginer la voix d’une boule, d’une mouche, d’une tasse de café ou de la mort demande un grand lâcher prise et beaucoup d’observation.» Par exemple : ce stylo-bille. Il faut d’abord comprendre ses propriétés motrices : pour se déplacer, il devra certainement tanguer péniblement sur le socle circulaire du bouchon. «Il aura donc très certainement une voix fatiguée.» Les IA auront-elles bientôt ce genre de génie ? On les sait désormais capables de faire parler Zendaya en bengali ou en chinois tout en préservant le grain de sa voix pour un coût inférieur au doublage humain. Certes, mais inventer de toutes pièces la voix des inanimés, c’est une autre histoire, n’est-ce-pas ? Un blanc. La comédienne sait que les machines le pourront un jour. «Mais avec quelle qualité ?»
Des ingénieurs disent parfois que les artistes ont trop tendance à sous-estimer les pouvoirs de ces machines. Brigitte Lecordier n’en démord pourtant pas : «Le doublage n’est pas une simple traduction mais relève de l’adaptation. Avec une IA, Zendaya parlera en français mais en conservant son jeu américain. Or, on ne joue pas la phrase de la même manière en fonction de la langue ! Et puis nous, on y met de l’âme.»

✍️ La suite de l'article d'Ève Beauvallet est à lire sur le site de Libé
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