En sonnant à la porte de cet hôtel particulier de Neuilly, on se demande tout à coup quelle mouche nous a piquée d’avoir proposé un apéro à Jacques Attali, que l’on classait déjà dans la catégorie des vieux profs lorsqu’on était étudiante.
Une aimable employée de maison nous indique un ascenseur : « monsieur » nous attend en haut où il vient de se faire photographier dans son « bureau ». On écrit « bureau », car c’est ainsi qu’il nomme cette immense pièce sous les toits qui pourrait facilement loger deux familles. A condition de les choisir précautionneuses. Car, ici, nous sommes plutôt dans un musée que dans un foyer d’hébergement : partout des œuvres d’art, un bouddha, des livres rares, un original du « J’Accuse… ! » d’Emile Zola, publié dans L’Aurore au moment de l’affaire Dreyfus, et une invraisemblable collection de sabliers, parmi lesquels le plus ancien du monde et celui de Louis XIV, rien que ça. Une collection construite « par hasard », assure l’essayiste de 79 ans aux yeux de chouette et au regard très doux. Reste qu’on ne peut s’empêcher d’y déceler une obsession à défier la mort et le temps qui passe.
Où que l’on pose le regard, tout raconte culture et prospérité : masques du Brésil, instrument de musique afghan, antiquité nord-américaine, lion en bois d’un manège anglais du XVIIᵉ siècle, cheval d’un sculpteur mexicain. Nous sommes incontestablement chez un homme qui a réussi sa vie sans avoir besoin d’exhiber une Rolex à son poignet, préférant se tenir bien droit dans son costume marine d’où dépasse une chemise à col Mao (question annexe : qui de sa génération porte encore des cols Mao à part Jack Lang et lui ?).
Photo : Jacques Attali, à son domicile de Neuilly-sur-Seine, le 15 mai 2023. @lucien.lung / Riva-Press #pourlemonde
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