jeudi 1 décembre 2022

Laure Calamy

          


C’est un film sur l’avortement mais c’est surtout l’histoire d’une naissance. 

En 1974, alors que des centaines de femmes meurent chaque année des suites d’un avortement clandestin, Annie (Laure Calamy), ouvrière, mariée, deux enfants, à distance de tout engagement politique, tombe enceinte accidentellement. 

Terrifiée, elle se rend dans l’antenne locale du Mouvement pour la liberté de l’avortement et de la contraception (Mlac), une association regroupant médecins, paramédicaux, bénévoles, tous engagés pour la légalisation de l’IVG, où on la rassure : Annie ne connaît-elle pas la méthode de Karman, un avortement par aspiration ? C’est indolore, gratuit, très simple à appliquer et à enseigner. Quelques jours plus tard, sur un lit de fortune installé chez une bénévole, et pendant qu’un gynécologue aspire l’œuf, Annie accouche symboliquement d’un autre soi. 

C’est grâce à cette voix féminine qui chante pour elle pendant la durée de l’opération, comme pour endormir un enfant, aux yeux attentionnés de cette bénévole qui pénètrent dans les siens pour la calmer, à la pédagogie dont font preuve les militantes et militants du Mlac pour expliquer à une femme comment fonctionne son corps. «C’est tout ? C’est déjà fini ?» 

Ce qu’Annie découvre là-bas d’écoute, de solidarité et d’engagement la lance dans un processus de métamorphose, déployé sur les deux heures du beau film solaire de Blandine Lenoir.

Voici donc un roman d’apprentissage qui s’illumine des multiples contre-pieds pris d’avec les attendus du film militant traditionnel : les trajectoires ne sont pas nécessairement traumatiques, le mari d’Annie n’est pas un macho, les scènes d’avortement ne sont pas filmées comme un arrachement glauque mais comme une simple libération. 

Elles sont même nimbées d’une lumière. 

Celle de découvrir, pour Annie, la puissance mobilisatrice du groupe, celle de «s’autoriser à penser».

📷 @martincolombet

👉 L'interview de Laure Calamy par Ève Beauvallet est à lire dans l'appli Libé.

🎬 «Annie Colère», de Blandine Lenoir, avec Laure Calamy, India Hair, Zita Hanrot… 1h58.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Merci pour votre passage

Manu Payet au théâtre de la Madeleine avec Emmanuel 2

  « Au fond, je suis fait pour raconter des histoires. » Alors il raconte,  @manupayet Avec précision et générosité. Son enfance à La Réunio...