«Tu es bête, tu es stupide, tu aimes ça n’est-ce pas ?» Une voix féminine générée par intelligence artificielle répète ces phrases comme des mantras. Le fichier audio est téléchargeable en ligne. Il en existe des centaines du même type, créés par et pour des hommes que le fantasme de la régression excite. Leur but : atteindre le stade «bimbo mentale». Leur technique : écouter en boucle des bandes-son s’inspirant de la méthode Coué afin de devenir des «poupées sans cervelle». Une application a d’ailleurs été mise au point, sous le nom de Bambi Cloud, pour leur permettre de créer, partager, consommer des «Bambi files» ou «Bambi sleep», des morceaux à écouter pendant la journée ou même la nuit, en dormant. Ceux-ci sont censés rendre les auditeurs toujours plus «gentils» et plus «stupides». «Happy», «empty», «vacant», «horny» sont des mots qui reviennent souvent dans ces fichiers : le bonheur, c’est être creuse. Sous-entendu : c’est excitant de renoncer à ses prérogatives de mâle.
L’histoire de cette communauté Bambi Sleep (BS) reste à écrire. Elle serait apparue dans les années 2010 sur Reddit, un forum de discussion américain. Actuellement, elle rassemble plus de 48 000 membres inscrits qui partagent des photos, des fichiers ou des comptes rendus d’expériences. Leur point commun est le suivant : ils se masturbent sur l’idée de devenir «passives». La plupart d’entre eux s’habillent en lingerie rose, portent des nuisettes et des cages de chasteté car il s’agit d’être «obéissante». «Bambi just want to be a good girl», écrivent-ils. Certains se sont fait siliconer : ils-elles portent des implants mammaires. Mais leur communauté ne saurait être confondue avec celle des MtF («male to female», qui désigne les personnes ayant effectué une transition de genre du masculin vers le féminin). «Bambi Sleep joue sur plusieurs fétiches, explique Portarossa, un des adeptes en ligne. Ces fétiches incluent la sissyfication (féminisation forcée) et la bimbofication (le désir de devenir une version moins intelligente, plus ouvertement sexualisée ou hyperféminine de soi-même).»
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📷 Georgi Fadejev / @gettyimages
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